samedi 31 mai 2008

"Reagan démocrates"

Si vous voulez impressionner votre entourage lors d’une conversation sur la campagne présidentielle américaine, parlez d’un air entendu des « Reagan démocrates » et vous aurez tout de suite l’air d’un spécialiste. Bien évidemment, vous pourriez parler plus simplement et évoquer la classe ouvrière qui se détourne de la gauche. Mais jouer l’expert réclame la maîtrise d’un certain jargon.

Ces « Reagan démocrates » sont des électeurs, appartenant notamment à la classe ouvrière blanche du nord des Etats-Unis, qui ont fait défaut aux démocrates lors des élections présidentielles en 1980 et 1984 et ont élu le républicain Ronald Reagan (la classe ouvrière noire, quant à elle, est pour l’instant toujours restée fidèle aux démocrates). Ils sont souvent plus conservateurs sur les questions de sécurité et d’immigration que le reste des démocrates. L’expression a été popularisée par le spécialiste des sondages Stan Greenberg, ancien conseiller des campagnes de Bill Clinton, Al Gore et John Kerry, dans une étude réalisée en 1985 dans le comté de Macomb, au nord de Detroit dans le Michigan, où il y a beaucoup d’ouvriers syndiqués de l’industrie automobile. Ce comté a voté à 63% en 1960 pour le démocrate John Fitzgerald Kennedy mais à 66% pour le républicain Ronald Reagan en 1984. Selon Greenberg, ces électeurs ont alors estimé que les démocrates ne s’intéressaient plus à eux mais s’occupaient des très pauvres, des chômeurs et des Africains-Américains.
Les « Reagan démocrates » sont considérés comme de plus en plus cruciaux pour le candidat démocrate Barack Obama, qui n’a pas réussi pour l’instant à les convaincre de sa candidature. Les victoires successives de son adversaire démocrate Hillary Clinton dans l’Ohio, en Pennsylvanie, dans l’Indiana, enVirginie Occidentale et dans le Kentucky ont montré qu’Obama, accusé d’être élitiste par Clinton, avait du mal à séduire ces « Reagan démocrates ».

Obama pourrait toutefois tirer partie de ses talents de grand communicateur, comme Ronald Reagan, pour séduire les républicains modérés, profondément déçus (c’est un euphémisme) par la présidence de George W. Bush (la guerre en Irak, la catastrophe de Katrina à La Nouvelle-Orléans, l’économie qui va mal…). Le livre de l’ancien porte-parole de la Maison Blanche Scott McClellan, « What happened », qui accuse Bush d’ « aveuglement » et le gouvernement d’avoir utilisé une « campagne de propagande » agressive pour faire accepter la guerre contre l’Irak à l’opinion publique américaine ne peut que qu’accroître la désaffection de ces électeurs républicains. Ils seraient d’autant mieux accueillis par Obama que celui-ci ne cesse d’invoquer la fin des divisions politiques et de tendre la main à l’autre camp (les meilleures citations du candidat : « le pays n’est pas aussi polarisé que notre système politique le suggère », « Il n’y a pas une Amérique de gauche et une Amérique de droite mais il y a les Etats-Unis », « Au final, c’est ce sur quoi porte cette élection, participons-nous à une politique du cynisme ou à une politique de l’espoir ? ») . Il existe même une organisation qui s’appelle « Républicains pour Obama », créée en 2006 par un ancien militaire déployé en Afghanistan, John Martin, qui voit dans Obama le président dont l’Amérique a besoin.

Si Barack est élu en novembre, on parlera alors peut-être des « Obama républicains », rangeant les « Reagan démocrates » dans la rubrique Histoire.

mercredi 28 mai 2008

Elle a gagné ?

Hillary s’éclate. Ou tout du moins c’est ce qu’elle cherche à faire croire, comme on peut le voir sur cette vidéo la montrant en campagne dimanche à Puerto Rico. On en oublierait qu’elle n’a quasiment aucune chance de battre son adversaire Barack Obama qui devrait être le candidat investi officiellement en août par le parti démocrate pour la présidentielle de novembre. Il reste encore trois primaires, le 1er juin à Puerto Rico et le 3 juin dans le Montana et dans le Dakota du Sud, et les résultats ne changeront rien à la confortable avance d’Obama en nombre de délégués. Mais Hillary danse quand même. Dans quelques semaines, elle aura sans doute tout le temps de prendre des cours de salsa.

jeudi 22 mai 2008

McCain invité au mariage d'Ellen

L’actrice Ellen DeGeneres, qui anime un talk-show télévisé très populaire, va bientôt se marier avec sa compagne, l’actrice Portia de Rossi, et elle a invité jeudi le candidat républicain à la présidentielle John MCain à venir à la cérémonie. « Alors, vous me ferez descendre l’allée ? Est-ce bien ce que vous dites ?”, a ironisé DeGeneres après que McCain, pas très à l’aise, a répété qu’il considérait que le mariage devait se limiter entre un homme et une femme.
Le mariage gay est revenu dans l’actualité aux Etats-Unis avec la récente décision de la Cour suprême de Californie de le légaliser. Jusque-là, seul l’Etat du Massachusetts aux Etats-Unis a légalisé le mariage gay. Ellen DeGeneres, qui vit à Beverly Hills (Los Angeles, Californie) avec Portia de Rossi, a annoncé le 16 mai dans son émission qu’elle allait épouser sa compagne.

« Je pense que les gens devraient être en mesure de procéder à des accords légaux, notamment pour ce qui concerne les questions d’assurance… Je crois simplement que le mariage ne peut avoir lieu qu’entre un homme et une femme. Et je sais que nous avons un désaccord respectueux sur ce sujet », a dit McCain. Ellen a plaidé pour le mariage gay : « Certains disent que c’est comme les noirs et les femmes qui n’avaient pas le droit de voter. Les femmes ont obtenu le droit de vote en 1920. Les noirs n’avaient pas le droit de voter jusqu’en 1870. Et cela semble une manière de penser dépassée, qui voudraient que nous ne soyons pas pareils. Nous sommes tous pareils, nous tous. Vous n’êtes pas différents de moi. Notre amour est le même. Quand quelqu’un dit: ‘Vous pouvez avoir un contrat, et vous aurez l’assurance’ mais pour moi c’est comme si on disait :’Vous pouvez vous asseoir ici, vous ne pouvez pas vous asseoir là”.

Les candidats démocrates à la présidentielle Barack Obama et Hillary Clinton ne sont pas non plus favorables au mariage gay mais soutiennent ouvertement des unions civiles pour les gays et lesbiennes.

mercredi 21 mai 2008

Pas si vite

« Pas si vite … La voix d’Hillary est NOTRE voix et elle parle pour nous toutes », proclame la page de publicité sur une pleine page du New York Times publié mardi, le jour des primaires dans le Kentucky et l’Oregon. Elle a été achetée par un groupe de fidèles de la candidate démocrate à la présidentielle Hillary Clinton, WomenCount PAC, qui lui apporte son “soutien inébranlable » malgré ses chances infimes de remporter l’investiture du parti démocrate face à Barack Obama. « Nous savons que quand les femmes votent, les démocrates gagnent. Maintenant, c’est la responsabilité de notre parti d’entendre nos voix et compter tous nos votes. Nous voulons qu’Hillary reste dans cette course jusqu’à ce que chaque vote soit compté, et nous savons que nos voix sont entendues ». La femme d’affaires californienne Susie Tompkins Buell, co-fondatrice de la marque de vêtements Esprit, est à l’origine de cette initiative. « Chaque vote DOIT être entendu. Chaque Etat DOIT être inclus. PERSONNE n’a le droit de demander à Hillary de renoncer quand tant de choses sont en jeu”, a-t-elle déclaré.

La très probable défaite de Clinton à l’issue du processus des primaires qui s’achève le 3 juin est mal vécue par certaines de ses supportrices les plus enthousiastes. Le ralliement à Barack Obama la semaine dernière de la grande organisation pro-avortement NARAL a suscité leurs grincements de dents. Elles ont considéré qu’il s’agissait d’une gifle à l’égard de Clinton qui s’est beaucoup battue pour défendre le droit à l’avortement. La présidente du groupe démocrate pro-avortement, Emily’s List, Ellen Malcom, a estimé « extrêmement irrespectueux à l’égard de la sénatrice Clinton… de ne pas vouloir lui laisser terminer les trois dernières étapes du processus des primaires ».

La militante féministe et commentatrice de gauche sur la chaîne de télévision Fox News, Susan Estrich, a mis en garde Obama. « Si Obama veut gagner, il a besoin des votes des femmes, chéries ou pas. Cela ne devrait pas considéré comme acquis. Ou plutôt, nous ne devrions pas être considérées comme acquises”. Estrich faisait référence à la remarque jugée sexiste qu’Obama a faite récemment à une journaliste de télévision, « Une seconde, ma chérie. Nous allons avoir un point de presse ». Elle ajoute : “Pour de nombreuses femmes, Hillary Clinton n’est pas juste un autre candidat, et le fait que cette campagne ait été submergée par le sexisme a rendu l’identification plus forte. Voir Hillary se faire battre et faire un come-back, voir les journalistes et commentateurs essentiellement (mais pas entièrement) masculins la rabaisser, s’interroger sur ses motivations, son apparence et son orientation sexuelle, a montré pour de nombreuses femmes non pas tout le chemin que nous avons fait mais tout le chemin qui reste à faire ».
Et Hillary Clinton, qui a remporté la primaire du Kentucky avec plus de 35 points d’écart sur Obama, n’a pas déçu ses supportrices les plus acharnées mardi soir. Elle s’est dite “plus déterminée que jamais”. « Je vais faire campagne dans le Montana, dans le Dakota du Sud et à Puerto Rico et je vais continuer à défendre les électeurs de Floride et du Michigan… Continuer à travailler, continuer à se battre, continuer à défendre ce que l’on croit être juste, c’est justement ce que je vais faire ».

Et la candidate a reçu le soutien inattendu de l’acteur-réalisateur Clint Eastwood. Connu pour être un supporter de longue date du candidat républicain John McCain, Eastwood a regretté le manque de respect dont elle fait l’objet. « Tout le monde essaie de lui dire de ranger ses affaires, mais cela ne ressemble pas à l’esprit de l’Americana », a-t-il dit au site d’information en lignes The Politico. « Mettez-vous à la place de (Clinton) : vous avez fait un millier de discours, vous avez serré un million de mains et vous vous êtes remué le cul. Et alors quelqu’un dit, ‘Pourquoi n’abandonnes-tu pas ? … Je regarde Clinton et je la plains et me demande pourquoi tous ces gens lui demandent de partir. Elle montre sa force en restant » dans la course.

Est-ce que Barack Obama va entendre le message des femmes qui soutiennent Clinton ? Le candidat, qui a remporté mardi la primaire de l’Oregon, a déclaré avoir désormais la majorité des délégués issus des primaires (même si cela n’est pas suffisant car cela ne tient pas compte des super-délégués) mais il n’a pas annoncé sa victoire comme l’avaient anticipé il y a encore une semaine ses conseillers. Il se peut que le candidat n’ait pas voulu donner l’impression de manquer de respect à l’égard de Clinton et de ses supporters. En attendant, Obama engrange chaque jour un peu plus de super-délégués, ces notables du parti démocrate qui participeront à la sélection du candidat à la présidentielle à la Convention de Denver fin août. Selon le décompte du site RealClearPolitics, il compte désormais une avance de 27 super-délégués sur Clinton.

Peu à peu, la victoire approche, mais Obama n’a pas encore atteint la ligne d’arrivée.

Pas si vite.

lundi 19 mai 2008

Vice-présidente

Ce n’était pas son objectif mais c’est bien ce qui pourrait arriver à Hillary Clinton : devenir la première femme vice-présidente des Etats-Unis, au côté de Barack Obama président. Cette idée d’un « ticket » Obama-Clinton ou Clinton-Obama a été évoquée à plusieurs reprises au cours de la campagne des primaires démocrates et elle rencontre un certain succès auprès des électeurs. Dans un sondage Gallup/USA Today publié la semaine dernière, 55% des démocrates sont favorables à un ticket Obama-Clinton, une idée qui a surtout les faveurs des partisans de Clinton. En revanche, une majorité de partisans d’Obama rejette cette idée.

Début mars, les Clinton, Hillary et son ex-président de mari Bill, avaient évoqué la possibilité d’un ticket mais ils voyaient Hillary numéro un. Leur objectif paraissait alors d’affaiblir la candidature Obama. « Il (Barack) gagnerait les zones urbaines et les élites, et elle gagnerait les zones rurales traditionnelles que nous avons perdu quand Reagan était président. En additionnant ces deux choses, vous auriez une force pratiquement imbattable », avait dit Bill Clinton. Obama avait à l’époque écarté fermement cette idée, accusant les Clinton de jouer un jeu tactique. Il avait estimé que ce n’était pas à Hillary Clinton, qui ne faisait pas la course en tête, de proposer ce ticket. Il craignait surtout que des électeurs se détournent de lui en se disant qu’il pourrait de toute façon devenir vice-président.

Aujourd’hui, l’option est clairement un ticket avec Obama numéro un. Les Clinton de retour à la Maison Blanche par la petite porte, c’est quelque chose pourtant de difficile à imaginer, et pour Obama cela relèverait sans doute du casse-tête au quotidien. Une des questions à régler serait notamment : que faire de Bill ? Déjà, elle se poserait si Hillary Clinton était élue présidente mais encore plus si Hillary devient vice-présidente. Dans un point de vue publié récemment dans le New York Times, l’auteur Jack Bass suggère d’occuper Bill. « Aucun occupant de la Maison Blanche n’a envie d’un ancien président agité traînant dans les environs ». Selon lui, il faut donner à Bill « un vrai boulot avec du vrai pouvoir ». Il suggère que Bill Clinton remplace son épouse comme sénateur de l’Etat de New York. « Le manque d’expérience législative sera … un nouveau défi pour lui ».

Ceux qui ne croient pas à l’option d’un ticket Obama-Clinton estiment aussi que Hillary Clinton risquerait d’entâcher l’image et le message de changement d’Obama, et qu’elle aurait du mal à accepter une place de numéro 2 après avoir tant espéré être la numéro 1. Ceux qui y croient disent que Barack n’aura pas le choix s’il veut s’assurer le soutien des électeurs fidèles à Clinton, notamment les femmes, et qu’il vaut mieux avoir Hillary sous contrôle à la Maison Blanche plutôt qu’au Sénat à lui pourrir la vie.

Dans un point de vue publié sur le site RealClearPolitics, Bob Beckel, un expert politique qui a travaillé pour la campagne présidentielle de Walter Mondale en 1984, estime qu’Obama va être contraint de choisir Hillary Clinton pour former un « ticket ». Selon lui, les électrices démocrates, dont une bonne partie soutient fermement Hillary, auront du mal à accepter le « gouverneur blanc » dont on évoque le nom comme colistier d’Obama. Bob Beckel pense que des super-délégués, dont certains doivent leur carrière aux Clinton, pourraient demander à Obama de choisir Clinton en échange de leur ralliement. « Si Hillary veut être sur le ticket, si ses délégués loyaux l’exigent et si la machine Clinton met tout son poids pour l’obtenir, elle sera sur le ticket », écrit-il.

Un groupe de démocrates VoteBoth milite pour un ticket Obama-Clinton. « Pourquoi se contenter d’avoir un candidat qui a le soutien de 51% des démocrates quand vous pouvez avoir le ticket de rêve qui rassemble 100% des démocrates ? » selon le porte-parole du groupe Sam Arora. « Une génération entière d’électeurs a été électrisée par cette campagne, par les positions des candidats, leur histoire et la possibilité de créer un vrai changement en Amérique. Nous ne pouvons pas laisser cet élan s’arrêter à la Convention nationale démocrate, quand le parti choisira le ticket. VoteBoth.com pense que les sénateurs Clinton et Obama devraient faire campagne ensemble pour l’élection générale ».

L’Histoire a en tout cas montré que des rivaux politiques sont capables de former des tickets. En 1960, John Fitzgerald Kennedy a choisi comme colistier Lyndon Johnson, ce qui paraissait impossible pour certains. Côté républicains, Ronald Reagan a choisi George Bush père comme vice-président. Tout est donc possible.

samedi 17 mai 2008

Histoire de clans

Chez les républicains, les Bush et les McCain, ce n’est pas la grande histoire d’amour. Pour préserver les chances de leur camp de remporter la présidentielle de novembre, la solidarité est officiellement de mise, mais les deux clans ont du mal à cacher leur inimitié.

Arianna Huffington, la bloggeuse de gauche qui a créé le site d’informations The Huffington Post, a affirmé récemment que le candidat républicain à la présidentielle John McCain lui avait avoué ne pas avoir voté pour Bush en 2000. La scène se déroulait lors d’un dîner à Los Angeles, peu après l’élection présidentielle de 2000. « Je parlais à un homme et une femme, deux républicains importants. La conversation s’est bientôt orientée vers le nouveau président. ‘Je n’ai pas voté pour George Bush’, a avoué l’homme. ‘Moi non plus’, a ajouté sa femme. Leurs noms : John et Cindy McCain ». Il est vrai que McCain avait été éliminé par Bush lors des primaires républicaines par une campagne de diffamation en Caroline du Sud. Il en avait clairement gardé un souvenir amer.

La campagne McCain s’est empressée de démentir l’information d’Arianna Huffington qui ne surprend pourtant pas grand monde. Il faut sauver les apparences de la solidarité sans faille entre républicains. « Ce n’est pas vrai et je vous prie d’examiner la source », a déclaré un porte-parole, Tucker Bounds, au Washington Post, mettant en doute les qualités professionnelles de la bloggeuse. “C’est une originale, une poseuse et une diva qui cherche à attirer l’attention »,” a renchéri Mark Salter, un proche collaborateur de McCain. McCain aussi a démenti sur la chaîne Fox News : « C’est totalement faux ».

Arianna Huffington est une ancienne républicaine devenue une femme de gauche. Elle se décrit elle-même comme « une ancienne femme de droite qui s’est transformée en populiste compatissante et progressiste ». Elle a été l’épouse d’un millionnaire, Michael Huffington, qui a été un élu républicain au Congrès pendant quelques années. Ils ont divorcé en 1997.
La révélation d’Arianna Huffington a été corroborée, selon le New York Times, par deux autres invités au même dîner donné par l’actrice Candice Bergen à son domicile de Beverly Hills. Il s’agit de deux acteurs de la série télévisée « West Wing », Bradley Whitford et Richard Schiff. Whitford a déclaré au Times qu’il avait été étonné des vives critiques de McCain à l’égard de Bush : « McCain expliquait combien il détestait Bush et les choses horribles que la campagne Bush avait faite à sa famille en Caroline du Sud… Il a dit qu’il (Bush) était incapable de se concentrer et après avoir parlé pendant 10 minutes il voulait changer de sujet et parler de base-ball ». Whitford ajoute qu’un autre invité a demandé à McCain s’il avait voté Bush et McCain a répondu non mais qu’il avait dû, en tant que républicain, apporter son soutien au candidat de son parti.

Côté Bush, on ne se force pas non plus trop à proclamer son amour pour McCain. Jenna Bush, l’une des filles du président américain (celle qui vient de se marier plutôt discrètement dans le ranch familial de Crawford) a déclaré dans l’émission de Larry King sur CNN le mois dernier qu’elle ne savait pas si elle allait voter républicain en novembre. Elle participait à cette émission aux côté de sa mère Laura pour faire la promotion de leur nouveau livre pour enfants. « Mon favori est le républicain », a répondu Laura, interrogé par King sur ses préférences entre les candidats à la présidentielle. King se tourne alors vers Jenna et lui demande : « C’est votre préféré aussi, j’imagine ». « Je ne sais pas », lui répond Jenna, laissant King estomaqué. Jenna tente alors de se rattraper en disant qu’elle avait été « trop occupée avec le livre pour vraiment prêter beaucoup d’attention » à la campagne. La question est de savoir si Jenna est une gauchiste élevée, sans le savoir, par un père qui a redécouvert Dieu sur le tard, ou si elle n’a fait que candidement révélé les mauvaises relations entre les Bush et les McCain. Je vous laisse choisir.

Le défi John McCain est de réussir à prendre suffisamment ses distances avec l’héritage du président George W. Bush tout en ne s’aliénant pas les électeurs qui restent indéfectibles à ce dernier (il reste populaire auprès d’environ 30% des Américains). Sur le fond, il ne se distingue pas trop, son programme très conservateur étant similaire à celui de Bush. Il lui reste la forme, afin que les 70% d’Américains qui sont mécontents de Bush croient à la légende de McCain le « non-conformiste ». Que des informations sur l’inimitié entre les deux clans soient publiées, cela ne fait pas de mal, mais pas trop tout de même, car les fidèles de Bush pourraient se détourner de McCain.

jeudi 15 mai 2008

Quand les chiens aboient...

Je vous laisse découvrir dans cette vidéo comment en neuf minutes un animateur radio pro-Bush qui aboie ses attaques contre le candidat démocrate Barack Obama est mis en pièce par l’animateur de l’émission « Hardball » sur la chaîne de télévision MSNBC, Chris Matthews, qui est un admirateur d’Obama (« J’ai senti un frisson qui montait dans ma jambe », a-t-il dit un jour à propos d’un discours prononcé par le candidat).

Le débat portait sur les propos du président George W. Bush qui a dénoncé jeudi, dans un discours devant le parlement israélien, ceux qui sont prêts à négocier avec des « terroristes et des extrémistes ». Ces propos ont été considérés comme une attaque voilée à l’égard de Barack Obama, qui plaide pour que les Etats-Unis parlent directement avec des pays comme l’Iran et la Syrie. Bush a fait un parallèle entre le fait de discuter avec des extrémistes et la « politique d’apaisement » menée dans les années 1930 par le Premier ministre britannique Neville Chamberlain à l’égard d’Adolf Hitler. Chamberlain a notamment signé avec Hitler les accords de Munich en 1938, qui cédaient une partie de la Tchécoslovaquie à l’Allemagne nazie.

L’animateur pro-Bush, Kevin James, dont l’émission politique « The Kevin James Show » est diffusée sur une radio de Los Angeles, commence par dire que Bush faisait, bien évidemment, référence à Barack Obama. Et il poursuit : « Le programme d’Obama à l’égard d’Israël est discutable… Barack est celui qui est soutenu par le Hamas… Son programme est dangereux pour ce pays et pour Israël ». Mais quand Matthews lui demande à de multiples reprises ce qu’on a reproché à Neville Chamberlain, Kevin James est incapable de répondre, si ce n’est de répéter qu’il est le symbole de la « politique d’apaisement ». « Si vous ne savez pas ce qu’est ‘la politique d’apaisement’, alors n’en parlez pas », rétorque Matthews. « Ce qu’on reproche à Neville Chamberlain, ce n’est pas d’avoir parlé à Hitler mais de lui avoir donné la moitié de la Tchécoslovaquie en 1938 », ajoute-t-il. « C’est pathétique », s’exclame Matthews qui compare James à la porte-parole de la Maison Blanche, Dana Perino, qui n’a pas su un jour dire ce qu’était la crise des missiles de Cuba.

La conclusion est revenue à l’autre invité de ce débat, Mark Green, président d’Air America Radio. Faussement secourable, il dit à James qui ne cesse de s’enfoncer : « Kevin, quand vous êtes au fond du trou, arrêtez de creuser ».

mercredi 14 mai 2008

Sur le Titanic

Hillary Clinton était encore un peu plus seule mercredi soir après le soutien officiel apporté à son adversaire Barack Obama par l’ex-candidat John Edwards dans la course à l’investiture démocrate à la présidentielle. « Les électeurs démocrates d’Amérique ont fait leur choix et moi aussi », a déclaré Edwards. Parce qu’un responsable de l’envergure d’Edwards n’avait pas annoncé jusqu’à maintenant sa préférence, Clinton pouvait toujours faire valoir qu’il n’était pas convaincu de la candidature d’Obama malgré la nette avance de celui-ci en termes de délégués accumulés au cours des primaires depuis janvier. Mais le ralliement progressif des derniers hésitants à Obama sonne le glas des derniers espoirs de Clinton.

Il reste bien encore Al Gore, ancien vice-président, prix Nobel de la paix et candidat malheureux à la présidentielle de 2000 face à George W. Bush, qui ne s’est pas encore prononcé. Et petite satisfaction pour Clinton, l’épouse d’Edwards, Elizabeth, très impliquée dans la campagne de son époux, ne s’est pas ralliée à Obama. Selon le New York Times, elle a exprimé en privé ses doutes sur la capacité du sénateur de l’Illinois à remporter l’élection de novembre.

L’écrasante victoire de Clinton dans l’Etat de Virginie Occidentale mardi n’aura eu, comme prévu, que peu d’impact. Sur son navire en perdition, le capitaine Hillary continue à braver, stoïque, les éléments déchaînés, mais le paquebot s’enfonce de plus en plus. Le camp Clinton ressemble désormais de plus en plus au Titanic. Alors que le paquebot coulait dans les eaux glacées après avoir touché un iceberg, l’orchestre continuait à jouer pour calmer les passagers des 1ères classes. Hillary Clinton est l’orchestre du Titanic à elle toute seule. Elle continue de sourire et d’afficher une combativité de gagnante alors qu’elle se dirige inéluctablement vers la défaite.

Edwards, qui s’était retiré de la course en janvier, a attendu longtemps avant d’annoncer son choix. Son ralliement a d’autant plus d’importance pour Obama qu’il avait séduit la classe ouvrière blanche avant que Clinton ne reprenne le flambeau. Et Obama a du mal à convaincre cette catégorie d’électeurs.

Clinton peut compter sur les super-délégués encore hésitants mais ils prennent les uns après les autres leur décision et leur choix va de préférence vers Barack Obama. Les super-délégués, au nombre de 800 environ, sont ces notables du parti démocrate qui, aux côtés des délégués issus des primaires, auront un droit de vote à la Convention du parti qui investira officiellement le candidat pour l’élection présidentielle de novembre. Selon le site Realclearpolitics mercredi soir, Obama a désormais une avance de 14 super-délégués sur Clinton. Jusqu’aux primaires de Caroline du Nord (qu’Obama a gagné facilement) et d’Indiana (que Clinton a remporté de peu) le 6 mai, Clinton avait plus de super-délégués qu’Obama et avait réussi à convaincre un certain nombre d’indécis d’attendre les résultats des primaires restantes. Mais alors que les derniers Etats se préparent à voter dans les semaines qui viennent (Kentucky et Oregon le 20 mai, Puerto Rico le 1er juin, Montana et Dakota du Sud le 3 juin), cela devient de plus en plus difficile pour elle.

John Edwards a quasiment signé mercredi soir la nécrologie de la candidate Clinton : C’est «une femme qui est faite d’acier. Elle est un leader dans ce pays pas à cause de son mari mais à cause de ce qu’elle a fait ». Une façon sans doute gentille de demander à Clinton de prendre la porte de sortie avant de subir une complète humiliation.

Mais Hillary n’a pas pour l’instant montré aucune intention de renoncer tant qu’il reste une chance infime. Le Titanic a mis deux heures et quarante minutes pour sombrer et aucun des membres de l’orchestre n’a survécu au naufrage.

Hillary pas encore KO

Hillary Clinton ressemble à un boxeur effondré après avoir pris un direct dans le visage et qui trouve l’énergie de se relever alors qu’il est pratiquement KO. La foule fascinée regarde l’arbitre compter les secondes au-dessus du boxeur à terre. Puis soudain, celui-ci se lève et reprend le combat, un peu vacillant, lançant un poing ganté en direction de l’adversaire, qui n’attend plus que la victoire. La foule exulte, car elle est là pour cela, pour le spectacle. Elle serait déçue qu’il soit écourté.

Hillary Clinton semble désormais n’avoir quasiment aucune chance de remporter l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle en raison de la nette avance de son adversaire Barack Obama en termes de délégués mais elle continue quand même. Et les électeurs démocrates ne lui en veulent pas. Au contraire. Selon un sondage publié très récemment par le Washington Post, près des deux-tiers des démocrates et des indépendants proches des démocrates affirment qu’elle doit continuer. Ils ne semblent pas impressionnés par les journalistes et commentateurs qui ne cessent de répéter depuis une semaine que tout est fini pour Clinton. Le présentateur vedette Tim Russert, très sûr de lui, avait assuré le soir du 6 mai sur la chaîne de télévision MSNBC après la nette victoire d’Obama en Caroline du Nord : « nous savons maintenant qui va être le candidat démocrate investi et personne ne va le contester ». Apparemment, cette déclaration n’a pas eu le succès escompté.

Selon le Post, peu de démocrates semblent inquiets de l’impact d’une campagne des primaires prolongée alors que le candidat républicain, John McCain, est déjà connu depuis plusieurs mois. Seuls 27% pensent qu’un affrontement prolongé entre Barack Obama et Hillary Clinton menace les chances des démocrates en novembre et la plupart estiment que le parti se ralliera à la candidature du vainqueur le moment venu. Cette bataille palpitante permet d’avoir les projecteurs toujours braqués sur les démocrates et de conforter l’idée que le futur président ou la future présidente des Etats-Unis sera choisi(e) dans leurs rangs.

Et Hillary continue d’assurer le spectacle. Elle a fait campagne en Virginie Occidentale avec acharnement. Le jour de la Fête des Mères, dimanche 11 mai, elle était sous la pluie avec sa fille Chelsea à rencontrer des électeurs, alors que Barack Obama avait pris un jour de repos.

Et, elle a gagné mardi de manière écrasante avec plus de 40 points d’avance sur son adversaire dans cet Etat. Cela ne changera pas grand-chose dans le décompte des délégués (il n’y en avait que 28 en jeu dans cet Etat) mais Clinton en est sortie plus combative que jamais. « Certains veulent écourter cet affrontement. Ils disent: ‘Abandonne. C’est trop difficile. La montagne est trop haute’. Mais ici en Virginie Occidentale, vous vous y connaissez en routes difficiles qui grimpent au sommet de la montagne”, a-t-elle déclaré après l’annonce des résultats. « Je suis plus déterminée que jamais à poursuivre cette campagne… Cet affrontement n’est pas encore fini. Nous n’avons ni l’un ni l’autre le nombre de délégués nécessaires pour gagner ».

A bon entendeur, salut.

lundi 12 mai 2008

Romney ne renonce pas

Mitt Romney, c’est un peu le Hillary Clinton des républicains. Il n’abandonne pas. Vous vous souvenez, il s’agit du businessman au sourire éclatant qui voulait gérer l’Amérique comme une entreprise et qui avait dû capituler le 7 février face à John McCain dans la course à l’investiture républicaine à la présidentielle.

Et bien, aujourd’hui, il croit toujours à son destin présidentiel et espère plus que jamais revenir dans la course, par la petite porte cette fois-ci. Son objectif est de former un « ticket » avec McCain et devenir son vice-président. S’ils sont élus, Romney peut toujours espérer que McCain ne fera qu’un mandat étant donné son âge (71 ans). Mitt sera alors bien positionné pour être de nouveau candidat à la présidence en 2012 et gagner cette fois-ci.

Pour cela, il faut oublier les blessures de la campagne des primaires alors que la presse américaine s’était faite l’écho de l’inimitié entre les deux hommes. Romney accusait McCain de ne pas être un vrai conservateur et de faire partie de la clique de Washington responsable, selon lui, de tous les problèmes. McCain à l’inverse accusait Romney d’avoir changé d’avis sur plusieurs sujets par opportunisme. Ils avaient échangé des propos acrimonieux, notamment lors d’un débat entre candidats républicains à la Maison Blanche fin janvier en Californie. McCain avait laissé Romney exsangue.

Mais Mitt Romney a des atouts que John McCain ne peut pas ignorer. Il pourrait rassurer la base conservatrice du parti républicain méfiante à l’égard de McCain. Et puis il s’y connaît en économie, ce qui n’est pas le fort de McCain, spécialiste des questions de sécurité. Et dans le contexte actuel de crise économique, cela peut vraiment être utile. Un site internet UnitetheGOP.com, qui vaguement revendique des « valeurs conservatrices », appelle à un « ticket » McCain-Romney : « Nous devons mettre la pression sur le parti républicain et McCain et leur dire que les conservateurs veulent Romney comme vice-président ».

Romney fait beaucoup d’efforts. Mi-février, il avait apporté son soutien officiel à McCain. « Même quand la compétition était serrée et que nos désaccords étaient l’objet de discussions, l’envergure de l’homme était évidente », avait-il dit. McCain avait eu l’air moins enthousiaste à son égard. Mi-mars, après quelques semaines de repos, Romney avait déclaré qu’il accepterait volontiers le poste de numéro deux sur le ticket républicain, dans sa première interview après son abandon. « Il n’y a vraiment pas de ressentiment, je pense, des deux côtés », avait-il dit sur la chaîne Fox News. « Quand il s’agit de sécurité nationale, John McCain est le gros chien et ils sont les chihuahuas », avait-il ajouté en référence aux candidats démocrates Barack Obama et Hillary Clinton.

Depuis, Romney a mis au service de McCain son équipe chargée de collecter de l’argent. Et il continue à chanter les louanges du candidat républicain, « un homme qui a été testé, un homme qui sait comment renforcer notre économie, un homme qui sait comment nous aider à vaincre contre les djihadistes extrémistes et les terroristes à travers le monde », a-t-il déclaré fin avril dans le Nevada.

Mitt Romney est désormais sérieusement considéré comme un possible choix de McCain pour former un « ticket » pour l’élection de novembre. Un exemple peut-être à suivre par Hillary Clinton le jour où elle reconnaîtra sa très probable défaite face à Barack Obama.

dimanche 11 mai 2008

Souriante envers et contre tout

« Je suis une mauvaise perdante », proclame la fausse Hillary Clinton, toute souriante et combative, dans ce sketch parodique de la célèbre émission « Saturday Night Live » sur la chaîne de télévision NBC. « Contrairement à mon adversaire, je ne vais pas perdre avec élégance. Ce n’est pas une critique du sénateur Obama. C’est simplement un fait ».
En février, alors que l’Obamamania battait son plein et qu’Hillary Clinton ne savait pas comment attaquer son adversaire, elle avait trouvé du réconfort dans un sketch de « Saturday Night Live » qui se moquait des journalistes obamaniaques. Et elle n’avait pas manqué de faire la publicité de l’émission lors d’un débat avec Obama à Cleveland (Ohio) fin février : « Puis-je seulement souligner que lors des derniers débats, il semble qu’on me pose tout le temps la première question. Cela m’est égal. Je suis heureuse d’y répondre, mais je trouve cela curieux, et si vous avez regardé Saturday Night Live, peut-être que vous devriez demander à Barack s’il se sent bien et s’il a besoin d’un autre oreiller ». On avait alors évoqué un effet Saturday Night Live sur la campagne.
Est-ce que ce nouveau sketch aura autant d’effet ? Pas sûr. Il semble que Barack Obama, tout près de remporter l’investiture démocrate pour la présidentielle, préfère se comporter en vainqueur magnanime pour mieux réconcilier les démocrates dont il a besoin pour l’élection de novembre.
Mais Hillary Clinton n’a pas encore dit son dernier mot.

vendredi 9 mai 2008

La guerre pour la Maison Blanche

« Le candidat républicain John McCain a déclaré que s’il était élu il réduirait de 15 millions de dollars les dépenses publiques en éliminant le Secret service », chargé de la protection du président des Etats-Unis. C’est l’information exclusive du site The Onion dans cette vidéo.
Juste une précision. The Onion, qui se déclare « la meilleure source d’informations d’Amérique », est spécialisé dans les fausses informations satiriques. Le journal, qui affirme avoir un tirage d'environ 700 000 exemplaires dans tout les Etats-Unis, traite de manière satirique et parodique des informations locales, nationales et internationales, à la fois réelles ou inventées.

jeudi 8 mai 2008

Faiseurs de roi

Enfin nous y voilà. La campagne pour l’investiture démocrate à la présidentielle touche à sa fin. Encore quelques scrutins dans les Etats qui ne se sont pas encore prononcés (Virginie Occidentale, Kentucky, Oregon, Puerto Rico, Montana et Dakota du Sud) mais rien de décisif n’est attendu de ce côté-là. Ce sont les super-délégués qui vont trancher entre Barack Obama et Hillary Clinton.

Les super-délégués sont ces notables du parti démocrate qui vont participer officiellement au choix du candidat à la présidentielle lors de la Convention du parti fin août à Denver. Ils voteront aux côtés des délégués issus des primaires qui ont eu lieu à travers les Etats-Unis depuis début janvier. Ces super-délégués sont au nombre de 796. Il s’agit de sénateurs, de membres du Congrès, de responsables locaux et nationaux du parti démocrate et d’anciens présidents démocrates (Bill Clinton et Jimmy Carter). Ils sont libres de choisir qui ils veulent, contrairement aux délégués issus des primaires. Etant donné la lutte serrée entre Obama et Clinton, ils se retrouvent dans le rôle de faiseurs de roi… ou de reine.

Selon ABC News mercredi, il restait 263 super-délégués qui n’avaient pas encore déclaré leur préférence entre Clinton et Obama. Et c’est eux qui peuvent désormais accélérer la conclusion de la campagne des primaires démocrates. Obama et Clinton ont donc renforcé leur opération de charme auprès d’eux. Mercredi, Clinton a rencontré un certain nombre d’entre eux à Washington pour les convaincre qu’elle est la meilleure chance des démocrates de gagner en novembre face au républicain John McCain même si elle a moins de délégués qu’Obama. Jeudi, c’était au tour d’Obama.

Il faut 2025 voix de délégués ou de super-délégués pour être déclaré vainqueur à la Convention. Mais cela ne tient pas compte des primaires de Floride et du Michigan qui ont été invalidées parce qu’elles ont organisées plus tôt, sans autorisation du parti. Si les délégués issus des primaires de Floride et du Michigan (remportées par Clinton) sont finalement pris en compte, la barre monte à 2209. Une réunion du Comité des règlements du parti démocrate est prévue le 31 mai pour tenter de trouver une solution.

Les super-délégués encore hésitants vont surtout faire leur choix en fonction des perspectives de victoire en novembre. Et tout peut les influencer, en particulier la presse et les experts de la politique à Washington. Nombreux commentateurs ont affirmé mercredi qu’Hillary Clinton n’a mathématiquement aucune chance et qu’il était temps qu’elle s’en rende compte. Evidemment, les super-délégués, avec une telle responsabilité, ne veulent pas se voir accusés d’avoir fait le mauvais choix. Mais ils peuvent se décider très vite, surtout après les dernières primaires le 3 juin dans le Montana et le Dakota du Sud.

Il y a plus de trente ans, le parti démocrate a décidé de créer ces super-délégués, considérés comme la voix de la sagesse en cas de primaires conflictuelles. Il voulait surtout éviter que l’investiture soit emportée par des outsiders comme George McGovern en 1972 (il avait été écrasé par le républicain Richard Nixon à l’élection de novembre) et Jimmy Carter en 1976 (il avait gagné de peu face au républicain Gerald Ford). Tout cela ne paraît pas très démocratique, surtout s’il s’agit de défaire le choix des électeurs démocrates lors des primaires. La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a déclaré en mars qu’il serait préférable que les super-délégués choisissent le candidat qui a le plus de délégués à l’issue des primaires. Et aujourd’hui, c’est Obama qui est en tête et Clinton n’a aucune chance de le rattraper. Mais la défaite humiliante de McGovern en 1972 est dans toutes les têtes.

mercredi 7 mai 2008

Droit dans le mur

Hillary Clinton ne vacille pas. Elle continue, la tête haute. « A toute vitesse vers la Maison Blanche », a-t-elle déclaré hier soir à Indianapolis, à ses supporters qui fêtaient une victoire finalement plus mince que prévue dans l’Indiana. On aurait plutôt envie de dire : « à toute vitesse droit dans le mur », tant les chances de la candidate démocrate à la présidentielle face à son adversaire Barack Obama, qui a remporté très facilement la primaire de Caroline du Nord, semblent de plus en plus infimes.

Mais pouvait-on attendre moins que cela de la part de la Femme de fer américaine ? Hillary se compare au boxeur Rocky Balboa, incarné par Sylvester Stallone dans « Rocky », la saga cinématographique pleine de sueur et de larmes. Comme lui, se plait-elle à dire, « je ne renonce jamais ». L’ex-First Lady, qui avait démarré l’an dernier sa campagne en expliquant, très sûre d’elle, qu’elle devait devenir présidente parce qu’elle avait toutes ces années d’expérience à la Maison Blanche, s’est transformée ces dernières semaines en égérie de la classe ouvrière. Et elle n’a pas hésité à proposer une suppression de la taxe sur l’essence pendant les vacances d’été, qui n’a pas beaucoup de sens économique selon les experts et coûterait cher aux finances publiques.

Hillary Balboa susciterait certainement l’incompréhension de ses plus fervents supporters si elle abandonnait maintenant. Même ses plus féroces critiques verraient leur analyse cauchemardesque d’une femme assoiffée de pouvoir mise à mal par un tel renoncement.

Les nerfs des partisans d’Obama vont encore être mis à l’épreuve dans les prochaines semaines. Les primaires prévues en Virginie Occidentale (le 13 mai), dans le Kentucky et dans l’Oregon (le 20 mai), à Puerto Rico (1er juin), dans le Montana et dans le Dakota du Sud (3 juin) ne devraient pas davantage départager les deux candidats démocrates en terme de nombre de délégués. Obama devrait garder une nette avance mais il ne devrait pas franchir le cap de 2025 délégués, qui serait fatidique pour Clinton.

Tous les regards se tournent désormais vers la date du 31 mai : c’est le jour où doit se réunir le Comité des règlements du parti démocrate. Ce comité doit notamment tenter de régler le sac de nœuds des primaires dans le Michigan et en Floride, qui ont été invalidées car organisées avant la date prévue, sans autorisation du parti. Hillary se bat pour trouver une solution car elle a gagné ces deux primaires. Si les délégués qu’elle a empochés sont finalement comptés, cela lui permettrait de réduire l’avance d’Obama. Mathématiquement, elle ne serait pas en tête mais tout peut arriver d’ici la Convention du parti démocrate fin août qui désignera officiellement son candidat pour l’élection de novembre.

Hillary finira sans doute sa course droit dans le mur mais qui sait?

lundi 5 mai 2008

Groovy baby

Bill Clinton a retrouvé le “groove”. C’est la nouvelle histoire que commencent à raconter les médias américains, qui adorent les histoires de chute et de rédemption, comme dans les bons films hollywoodiens.

Ces dernières semaines, le monde politique et médiatique décrivait un ex-Président hors du coup, irascible, narcissique, multipliant les gaffes. Pour résumer : un gros problème pour son épouse Hillary, qui tente de gagner l’investiture démocrate à la présidentielle de novembre face à Barack Obama.

« L’Histoire retiendra peut-être le jour de la primaire de Pennsylvanie (le 22 avril) comme celui où Bill Clinton est devenu la figure la plus tragique de la campagne 2008 », écrit le magazine Newsweek dans son édition du 5 mai. L’auteur de l’article, Jonathan Darman, fait référence à l’accès de colère de l’ex-Président démentant vigoureusement (alors que ses propos avaient été prononcés dans un entretien à une radio) avoir accusé la veille Barack Obama d’avoir joué la carte raciale en Caroline du Sud. Et alors que dans la soirée Hillary gagnait la primaire de Pennsylvanie, Bill semblait une fois de plus hors du coup, selon Darman. « Qu’est-il arrivé à Bill Clinton ? Pendant des mois, cela a été un grand mystère de la campagne : comment l’homme politique le plus talentueux de sa génération pouvait-il devenir une incessante machine à gaffes ». Des hypothèses ont été avancées : l’ex-Président aurait passé trop de temps ces dernières années avec des milliardaires ou il tenterait inconsciemment de saboter la campagne de son épouse. Darman pense plutôt que l’équipe de campagne d’Hillary a décidé que Bill devait garder profil bas et ne pas trop déployer son charme. Et c’est un rôle que l’ex-Président a du mal à endosser. « Gagner cette fois-ci est le boulot d’Hillary, ce qui parfois signifie que se plaindre est la seule tâche qui reste à son mari ».

Mais, ces derniers jours, un nouveau portrait a commencé à émerger, réhabilitant Bill Clinton. “Alors que Clinton faisait campagne en Pennsylvanie, il était rarement l’homme politique caricaturé dans la presse. Il continue à avoir un meilleur contact avec les électeurs que son épouse ou Obama », raconte dans le New Yorker Ryan Lizza qui l’a suivi lors de certaines de ses étapes. Selon lui, Bill a toujours le talent d’expliquer simplement aux gens des choses compliquées et il sait les faire rire. « Clinton est furieux que cette partie de lui soit pratiquement absente de la couverture médiatique ». Selon Lizza, la presse se focalise sur les erreurs que peut faire Bill Clinton, ce qui a ainsi « occulté un débat sérieux qu’Obama et l’ex-Président ont essayé d’avoir » sur le bilan économique de la présidence Clinton. Obama affirme que les problèmes économiques des Etats-Unis sont autant la faute de Clinton que de Bush, critiquant notamment la dérégulation du secteur bancaire et des télécommunications sous l’ère Clinton. Cette façon de voir les choses exaspère Bill Clinton mais les médias ne s’y intéressent guère, préférant les gaffes, relève Lizza.

Le New York Times a emboîté le pas du New Yorker et titrait lundi : “Comment Bill Clinton a retrouvé le ‘groove’ ». L’auteur de l’article, Adam Nagourney souligne le nouveau rôle que s’est attribué Bill Clinton : « ambassadeur auprès des plus petits endroits du pays ». L’ex-Président fait ainsi campagne pour son épouse dans des petites villes qui n’ont probablement jamais vu de président jusque-là et il y défend inlassablement la candidature d’Hillary. Entre samedi matin et lundi soir, il aura rendu visite à 21 petites communautés en Caroline du Nord et dans l’Indiana, relève Nagourney. « Est-ce que M. Clinton finalement trouve son rythme, comme le dit un ami, alors que la campagne touche à sa fin ? », s’interroge le journal, qui conclut : « M. Clinton, a toujours été le genre de candidat qui est le meilleur quand les choses vont le plus mal ».

A n’en pas douter, cette nouvelle image d’un Bill ayant retrouvé le « groove » l’emportera si Hillary Clinton gagne l’Indiana ET la Caroline du Nord (même si cela paraît peu probable en ce qui concerne la Caroline du Nord). Si elle perd les deux Etats, Bill Clinton apparaîtra de nouveau comme un personnage tragique, un has-been qui n’accepte pas que son heure de gloire soit passée.

dimanche 4 mai 2008

Barack Skywalker

Barack Obama en Luke Skywalker et Hillary Clinton en Dark Vador (Darth Vader en version originale). Des partisans d’Obama n’ont pas résisté à la tentation de comparer dans cette vidéo parodique l’affrontement entre les deux candidats démocrates à la présidentielle à la lutte entre le Bien et le Mal dans « La Guerre des Etoiles », l’épopée cinématographique en multiple épisodes signée par George Lucas. Les électeurs américains sont prévenus dès le début du clip, qui a déjà été vu plus de 500 000 fois sur YouTube : « Dans la longue histoire du monde, seules quelques générations se sont vues accorder le rôle de défendre la liberté à un moment de danger maximum…. C’est le choix que notre nation doit faire… ». Hillary incarne le Côté Obscur de la Force et Barack le Côté clair. Les fameux sabres laser sont au rendez-vous. Michelle Obama, l’épouse du candidat, est la princesse Leia, le sénateur Bill Richardson, qui a apporté son soutien à Obama, est Yan Solo, le contrebandier qui se bat aux côtés de Luke Skywalker. L’époux d’Hillary, l’ex-président Bill Clinton, et le président Abraham Lincoln, assassiné en 1865, font également de furtives apparitions. Le candidat républicain John McCain est en revanche absent. Le clip est intitulé « The Empire strikes Barack », en référence à l’un des épisodes de la saga : « L’Empire contre-attaque ». C’est dans cet épisode que Dark Vador dit à Luke : « Je suis ton père ». Mais pour Barack Obama la mission n’est pas de tuer le père mais visiblement de se débarrasser de la mère.

samedi 3 mai 2008

Fille de campagne

On se souvenait d’elle, adolescente au physique ingrate, mal à l’aise dans son rôle de Première fille des Etats-Unis. C’était dans les années 1990, du temps de la présidence de son père Bill. Elle avait douze ans quand elle déménagea à la Maison Blanche. Elle avait dû plus tard affronter l’humiliant scandale Monica Lewinsky à un âge où on préférerait ne pas avoir à gérer les escapades sexuelles de son père.

Chelsea Clinton, 28 ans, a depuis bien grandi et s’est révélée, contre toute attente, un atout de campagne pour sa mère Hillary, candidate démocrate à la Maison Blanche. Chelsea menait jusque-là une vie discrète, éloignée de la politique et ne semblait pas très à l’aise sous le feu des projecteurs. On savait qu’elle avait étudié à Stanford, en Californie, puis à Oxford, en Grande-Bretagne, qu’elle s’était installée à New York où elle travaille comme analyste dans un hedge fund avec un confortable salaire de plus de 200 000 dollars par an. Son petit ami, Marc Mezvinsky, est un banquier chez Goldman Sachs dont le père, un ancien élu du Congrès, est actuellement en prison pour une affaire d’escroquerie.

Quand elle a commencé à parcourir le pays au nom de sa mère en janvier, la jeune femme, qui a pris un congé sans solde, n’était pas prise au sérieux. Elle était là pour tenter de séduire les jeunes électeurs dans les universités, une tâche bien difficile face au candidat Barack Obama, particulièrement populaire dans cette catégorie de la population. Un correspondant de la chaîne de télévision MSNBC, David Shuster, affirmait alors que l’équipe de campagne d’Hillary forçait Chelsea « à faire la pute » en lui demandant de passer des coups de fil aux super-délégués, ces notables du parti démocrate dont les voix pourraient être décisives dans la lutte entre Barack Obama et Hillary Clinton. Cela lui a valu d’être temporairement suspendu pour cette remarque jugée déplacée.

De semaines en semaines, Chelsea Clinton a pris de l’assurance. Un jour un étudiant lui a demandé si le scandale Monica Lewinsky avait entamé la crédibilité de sa mère. « Je ne pense pas que cela soit vos affaires », a-t-elle répondu du tac au tac. Elle se révèle convaincante et parle avec aisance des sujets les plus sérieux. Contrairement à son père, elle n’a pas encore fait la Une des journaux concernant d’éventuelles gaffes. Prudente, elle évite les médias et ne leur accorde pas d’entretiens. “Chelsea a montré au cours des derniers mois qu’elle est, à n’en pas douter, une Clinton. Elle a la politique dans la peau et elle est étonnamment bonne en la matière », estime le New York Magazine.

Les remarques sexistes concernant sa mère ont sans doute joué un rôle dans son implication dans la campagne. Chelsea a envoyé autour d’elle un point de vue écrit par une militante féministe Robin Morgan se plaignant que les femmes ne soutiennent pas davantage Hillary Clinton. « Je ne suis pas d’accord avec tout… mais je crois qu’il est important d’examiner cette thèse. J’avoue que je ne m’en étais pas rendue compte jusqu’à ce que des types se lèvent et crient « repasse mes chemises » et qu’en plus les médias s’en soient amusés et n’aient pas été scandalisés », a-t-elle ajouté en commentaire.

Alors qu’on lui demandait fin mars lors d’un meeting électoral en Pennsylvanie si sa mère ferait un meilleur président que son père, elle a répondu : « Je pense qu’elle serait un meilleur président ”. Et elle l’a redit en avril, en expliquant qu’Hillary était « davantage préparée et plus progressiste » et que son père en 1993. Selon Chelsea, il ne maîtrisait pas alors complètement le fonctionnement du Congrès quand il est arrivé à la Maison Blanche. Plutôt vexant pour Bill.

vendredi 2 mai 2008

Meilleur qu'au bowling

Barack Obama a montré ces derniers jours dans l’Indiana et en Caroline du Nord qu’il savait jouer au basket et bien mieux que son humiliante prestation au bowling il y a quelques semaines en Pennsylvanie. Les conseillers du candidat démocrate à l’élection présidentielle de novembre ont longtemps hésité à afficher ses talents de basketteur car ils craignaient l’aspect trop communautaire de ce sport associé à la communauté noire aux Etats-Unis. Obama se présente en effet comme un candidat post-racial, capable de réconcilier un pays divisé. Mais après avoir été ridiculisé au bowling (un loisir très apprécié par la classe ouvrière blanche), il devait montrer qu’il n’était pas qu’un intellectuel amateur des plaisirs de l’esprit. Les images tournées à Maple Crest Middle School à Kokomo (Indiana) le montrent très à l’aise, il fait plus jeune que son âge. Et ce n’est pas son adversaire démocrate Hillary Clinton et son adversaire républicain John McCain qui pourront le contester sur ce terrain.