lundi 25 février 2008

L'Architecte

Il avait disparu de la circulation fin août, après avoir démissionné de son poste de conseiller à la Maison Blanche. Karl Rove, surnommé « l’Architecte » par le président George W. Bush pour le remercier de l’avoir placé et maintenu au pouvoir grâce à son habileté politique diabolique, avait alors servi l’habituelle explication, très en vogue chez les responsables politiques américains qui ne veulent pas dire les véritables raisons de leur départ : « je dois le faire par amour pour ma famille ». Vaguement, il avait ajouté qu’il pensait écrire un livre sur sa carrière dans la politique et qu’il allait quitter Washington pour retourner au Texas.

Depuis quelques semaines, Karl Rove est de retour, cette fois-ci dans les médias. Il est apparu comme commentateur politique sur la chaîne de télévision Fox News le jour du « Super Tuesday », le 5 février. Pas de coup d’éclat ce soir-là. Selon le blog politique du Washington Post, sa prestation n’a pas été hauteur de la réputation du personnage : « Rove est apparu vraiment fade à la télé. Comme une grosse gaufrette à la vanille”. Certes, il a montré qu’il s’y connaissait en stratégie électorale, maniant avec dextérité le décompte de délégués de chaque candidat, mais il n’a pas dépassé le stade du bon élève.

Placé au pinacle par les républicains pour leur avoir permis de gagner les présidentielles de 2000 et 2004, « l’Architecte » avait perdu de son aura avec leur défaite aux élections de « mid-term » en 2006. En revanche, il reste toujours un épouvantail pour les démocrates qui vomissent les pratiques malfaisantes, dont il était, selon eux, un spécialiste. Rove est tellement détesté par une partie des Américains que le discours qu’il devait prononcer cette année à l’occasion de la remise des diplômes à Choate Rosemary Hall, un lycée privé dans le Connecticut, a été annulé en raison des protestations d’étudiants et de professeurs.

« Alors, aimez-vous être une star de la télé ? », a demandé à Rove un des présentateurs de Fox News, Alan Colmes. “C’est un peu stressant. Comment pouvez-vous faire cela depuis des années, Alan? », a plaisanté l’Architecte. Est-ce le stress ou bien des vacances trop prolongées, mais Karl a perdu un peu de son côté magicien. “Je pense que cela va être la sénatrice Clinton parce qu’à mon avis les meilleures opportunités du sénateur Obama sont derrière lui », avait-il prédit le soir du « Super Tuesday ». Avec onze victoires consécutives depuis le 5 février, Barack Obama lui a donné complètement tort. Pour se rattraper, « l’Architecte » a publié un point de vue dans le Wall Street Journal le 21 février, dans lequel il estime qu’Obama n’a pas été assez critiqué par Hillary Clinton. Et Rove de donner des conseils à Hillary : « Mme Clinton peut davantage attirer l’attention sur l’absence de succès de M. Obama…. L’incapacité de celui-ci à agir, à défendre ce qu’il affirme être désormais ses priorités pourrait être sa dernière chance de marquer des points ».

Alors Rove, nouveau conseiller de Clinton ? C’est plutôt mal parti après les propos de la candidate samedi. Lors d’un meeting à Cincinnati (Ohio), elle a accusé son adversaire Obama d’avoir caricaturé dans un tract ses propositions sur une couverture santé universelle. « Ce n’est pas parce que le sénateur Obama a choisi de ne pas présenter un plan instituant une couverture santé universelle que cela lui donne le droit de m’attaquer parce qu’en ai un. Ayons une vraie campagne. Assez des discours, des grands rassemblements et des tactiques qui sont sorties tout droit du manuel de Karl Rove ».

« L’Architecte » risque encore de faire parler de lui d’ici l’élection présidentielle en novembre.

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